dimanche 4 juillet 2010

Yves gourgaud : Du Félibrige aujourd'hui - avec réponse de Rémi Venture & Contribution de Jean Lafitte !

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Les pages de Marsyas 2 sont à la diposition de Yves Gourgaud sur une polémique qui agite le Félibrige en ces jours d'après Santo Estello ...


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Caravaggio : le Baiser de Judas



QUI EST LE « TRAITRE » ?


On a tous en mémoire la tragi-comédie d’ une équipe de France de football dont le capitaine dénonce publiquement, non les erreurs ou les horreurs commises, mais le fait que la presse en ait fait état : « Il y a un traître parmi nous, et il faut savoir qui : c’est ça le problème », disait-il en substance.
Je soumets aux lecteurs de MARSYAS le même problème : j’ai sous les yeux des extraits d’un article de presse qui, parlant du Félibrige, se montre d’un anti-occitanisme épouvantable ; il menace même le Félibrige de SCISSION (cf. plus bas). Or certains passages prouvent à l’évidence que l’auteur ne peut être qu’introduit dans le saint des saints du Félibrige, à savoir le Consistoire : il s’agirait donc d’un MAJORAL qui aurait rendu publiques des affaires et dissentions internes à l’organisation.
Qui est le traître ? Je vous demande de m’aider à le démasquer. Voici les extraits de l’article, accompagnés entre parenthèses de mes propres commentaires, en français :

« Quand proutesterian, soulet (ce mot est mis en relief dans le texte original) contro l’eleicioun d’un Oucitan à la cigalo de /.../, semblavo que li Prouvençau, incounsciènt dóu dangié, pensavon autramen que nautre. »

(La langue provençale est ici peu claire : l’auteur parle-t-il en son propre nom (SOULET), ou au nom d’un groupe (PROUTESTERIAN, NAUTRE) ? Autre problème : l’auteur est-il Provençal lui-même ? Il écrit en mistralien, mais il semble s’opposer aux « Prouvençau » inconscients. Une seule chose est sûre : il considère qu’élire un Occitan représente un DANGER, cf. la suite)

« Or, aquelo eleicioun coustituissié uno atencho à la situacioun dóu Mistralisme en Prouvènço. Èro uno brèco dins la cadeno adeja proun magagnado dóu Felibrige prouvençau. Aquéli que n’èron esta lis oubrié sabien ço que fasien. Lis avian avisa, avans lou vote, de l’errour qu’anavon coumetre en favourisant l’eleicioun d’un Oucitan /.../ Vouguèron rèn entendre. »

(Les accusations se précisent : l’auteur avait tiré la sonnette d’alarme, mais « les Provençaux » du Consistoire n’ont rien voulu entendre. Donc, si l’on suit le raisonnement, ils sont responsables, bien sûr, de l’élection d’un Occitan, mais avec cette élection c’est LE MISTRALISME EN PROVENCE qui est atteint, alors qu’il est déjà mal en point, selon l’auteur. Les Majoraux provençaux sont donc ici accusés d’aveuglement ou pire encore, de collusion consciente et réitérée avec les ENNEMIS DU MISTRALISME. L’accusation, on le voit, est très grave : s’il s’avérait que le Majoral Venture soit l’auteur de cette accusation (ce que je ne crois pas), nul doute que des voix haut placées s’élèveraient au sein du Félibrige pour réclamer son exclusion. Surtout que la diatribe n’est pas terminée :)

« Adounc, la cigalo anè à /.../ qu’ ansin pousquè auboura lou pavaioun dóu Counsistòri sus soun annèisso marsiheso de l’IEO de Toulouso »

(Au détour de cette phrase, on voit que l’auteur considère l’entreprise occitane comme une INVASION : Marseille devient une « annexe » de Toulouse, une place forte conquise par l’occitanisme. Et le Consistoire est clairement et directement accusé de COMPLICITÉ : c’est bien son « pavillon » qui va flotter sur ce territoire annexé par l’ennemi. On retrouve l’accusation, très grave, d’ intelligence avec l’ennemi : le Consistoire a trahi la Provence au profit d’une entreprise étrangère hostile : l’Occitanie, sa capitale Toulouse et son armée de croisés IEO)

« I’aguè, urousamen, en Prouvènço, de majourau que, pamens, sentiguèron lou dangié /.../ Falié empacha que la brèco s’agrandigue e que cènt an de Felibrige prouvençau se vegue arrouina pèr l’intrado massivo au Counsistòri d’uno majourita oucitano. »

(Si le Majoral Venture était l’auteur de ces lignes, cela ressemblerait furieusement à un plaidoyer pro domo !...
Le mot DANGER est écrit pour la seconde fois : les majoraux de Provence ne sont donc pas tous vendus à l’ennemi occitan. Mais le danger est clairement défini : LE FELIBRIGE PROVENCAL est MENACE DE MORT par les manoeuvres occitanes, et avec lui un siècle de Mistralisme en Provence. On remarquera bien sûr que ce sont les arguments du Collectif Prouvènço, que le Félibrige officiel juge si « extrémiste » : le traître soutient exactement les mêmes thèses, et son anti-occitanisme me semble même encore plus radical dans ses formulations, avec son vocabulaire guerrier et son appel pressant à « la patrie en danger »)



Il y a donc réaction vive contre les manoeuvres occitanes, et contre-réaction de la part des félibres occitanistes, si l’on en croit ce passage :
« L’ Escolo parisenco « coumpren pas ‘quéli manifestacioun d’un « racisme » grafi »
(S’agit-il du « Viro-Soulèu », ridiculement rebaptisé « Vira-Solelh » par la bande occitaniste menée par le Majoral Fourié ? En tout cas le traître ne se laisse pas impressionner par cette accusation :

« Nòsti legèire sabon ço que fau pensa d’aquéu « racisme » grafi /.../ E quand nous espingoularien enca mai l’etiqueto de « racisto », noun poudrian pèr acò leissa l’eiritage mistralen à l’asard d’èstre descara pèr uno reformo grafico qu’es la negacioun de cènt an de Felibrige prouvençau »

(Le traître n’en est pas à son coup d’essai, puisqu’il affirme qu’il a déjà exposé ses opinions devant le public. Mais surtout, il livre en une phrase l’essentiel de son intervention : L’OCCITANISME GRAPHIQUE EST INCOMPATIBLE (« es la negacioun ») AVEC L’IDEE FELIBREENNE ET MISTRALIENNE. Selon lui, l’ « héritage mistralien » est mis en danger de mort par l’occitanisme graphique (remarquons qu’il n’envisage nullement les autres aspects de l’occitanisme, le politique en particulier : son combat est GRAPHIQUE)
C’est bien sûr un très rude coup porté au Félibrige officiel qui admet en son sein des majoraux occitanistes et fiers de l’être (à l’heure actuelle : Fourié, Passerat et bien d’autres) : selon le traître, ces majoraux oeuvrent directement CONTRE MISTRAL ET LE FELIBRIGE. Cette accusation est d’une grande force, et même d’une grande violence.)

« Vaqui tout. Se lou volon coumprendre, lou Felibrige miejournau pourra countunia soun camin. Se noun, se devèn nous pèu-tira ansin entre gènt d’eici e gènt d’eila, tant alor faudrié segui lou counsèu que baiavo / ...?.../ au Capoulié e ana chascun de soun coustat »

(La conclusion est terrible : soit le Félibrige « comprend » le danger mortel que représente l’occitanisme, même réduit à sa dimension graphique, soit LA SCISSION DEVIENDRA NECESSAIRE.)

Je ne crois pas avoir jamais lu un tel jugement dans les critiques portées par le Collectif Prouvènço sur le Félibrige : qui est donc ce traître infiltré dans l’organisation et qui en démolit si férocement la politique de compromission avec les Occitans ?
Je compte sur les lecteurs attentifs et assabenta pour nous donner ici lou mot de Santo Claro. Bien entendu, je garantis authentiques toutes les citations de cet article.



Yves Gourgaud,

juillet 2010

L'avis de Roumié Venture suite à la prise de position ci-dessus :

" Adiéu, à Marsyas 2,

Assabenta pèr uno amigo, vene de legi lou documen d'Ives que metiguères i'a gaire sus toun blog, e mounte ounte siéu evouca. Dins aquelo escasènço e pèr que li causo fugon claro, ai de te precisa ço que vaqui.

- Siéu plus esta presènt à uno sesiho dou Counsistori despièi la Santo-Estello de Grèus...
- Adounc, i'ère pas mai aquesto annado que li cop d'avans, mume se mandère moun poudé à Mario-Nadalo Dupuis pèr pousqué vouta, en particulié pèr lou Paire Desplaches qu'a touto moun estimo.
- Se M.-N Dupuis me rendiguè pièi comte dis eleicioun de majourau, me diguè pas rèn de ço que se ié diguè toucant lou rèsto de soun ordre dou jour. Sabe dounc pas rèn de ço que se ié passè, e M.-N. pourra te lou counfierma...

- Autro causo. Quouro vole m'espremi sus quauco-rèn d'un biais clar em'ouficiau - e mi pousicioun soun bèn couneigudo...- es pas moun biais de pas signa un pretendu article - que fuguè publica mounte ? Ives Gourgaud dis pas rèn aqui dessus...
- Signale que s'aguèsse vougu afourti quauco-rèn, l'auriéu fa dins lou magasino que n'en siéu l'un de si baile, valènt-à-dire Me Dison Prouvènço.
- Se pourra d'aiours arremarca que pèr uno voulounta bèn chausido de nosto redacioun, parlan pas gaire, vuei, dis afaire felibren dins Me Dison Prouvènço. Noun soulamen pèr pas empura lou gavèu - e se saup que nosti raport emé lou Felibrige soun tras que marrit...-, mai tambèn pèr ço que i'a de causo, en Prouvènço, enca mai marrido - vèire lou papafard messourguié emai faus de l'IEO sus la "Crotz de Provença" publica pèr espandi dins noste païs un insigne qu'es pas siéu dins l'escasènço de l'oucitanisa...

Adounc, te sariéu duvènt de bèn vougué publica aqueste message dins toun blog pèr bèn faire counèisse ma pousicioun aqui dessus e leva touto ambigüeta.


Roumié VENTURO


en français :

Alerté par une amie, je viens de prendre connaissance du document publié sur ton blog par Yves Gourgaud, dans lequel je suis évoqué. A toutes fins utiles, je me permets de préciser ceci;

- Je n'ai plus assisté à une séance du Consitoire depuis la Sainte-Estelle de Gréoux-les-Bains...
- Je n'étais donc pas présent cette année, même si j'ai envoyé un pouvoir à Marie-Noëlle Dupuis afin de pouvoir voter, en particulier pour l'Abbé Desplanches qui a toute mon estime...
- Si M.-N Dupuis m'a rendu compte des élections de majoraux, elle ne m'a aucunement tenu au courant des propos tenus au Consistoire. Je n'en sais donc rien du tout, et cette dernière pourra te le confirmer...

- Par ailleurs, lorsque je veux prendre une position claire et officielle - et mes position sont bien connues...-, je n'ai pas l'habitude de ne pas signer un prétendu article - publié où ? Y. Gourgaud est muet à ce sujet....
- Je signale que si j'avais voulu me manifester, je l'aurais fait dans les colonnes du magasine dont je suis l'un des responsables, c'est-à-dire Me Dison Prouvènço.
- On remarquera par ailleurs par une volonté délibérée de notre rédaction, nous n'évoquons guère aujourd'hui les affaires félibréennes dans Me Dison Prouvènço. Non seulement pour ne pas envenimer nos rapports déjà tres mauvais avec le Félibrige, mais aussi parce qu'il y a aujourd'hui en Provence des choses qui se passent et qui sont encore plus graves - cf. le prospectus faux et mensonger de l'IEO sur la "Crotz de Provença" visant à diffuser dans notre pays un insigne qui n'est pas le sien afin de l'occitaniser...

Je te serais donc infiniment reconnaissante de bien vouloir publier cette mise au point.





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Enfin est pour conclure la réponse d'un Gascon qui est loin d'être une réponse de Gascon (c'est facile je sais) : Jean Lafitte




Je n'ai pas le temps d'écrire longuement sur le débat soulevé par l'article d'Yves sur Marsyas, et d'ailleurs je n'ai pas encore achevé mes réflexions sur le sujet.

Mais l'approfondissement des écrits de Mistral qui sont censés fournir la doctrine du Félibrige me conduit de plus en plus aux propositions suivantes :

– Mistral jeune homme s'est trouvé embarqué dans un « provençalisme » poétique et patriotique largement ignorant des réalités du monde d'oc;
– ignorant de par sa situation sociale tous les problèmes du petit monde d'oc, celui qui ne savait guère s'exprimer en français et subissait la loi des « Moussus », il a pu poétiser à sa guise;
– ayant eu l'immense chance d'être présenté à Lamartine, fort influent à l'époque, et sous la fausse étiquette d'un jeune poète paysan, il a vogué sur la célébrité et s'est consciencieusement appliqué à soigner son image (Fébus, Henri IV et bien d'autres l'avaient compris et pratiqué avant lui);
– héritant des mensonges de Jean de Nostredame qui avaient si bien fait de tous les troubadours des Provençaux, il a étendu la Provence et le provençal à tout l'ensemble d'oc;
– ayant fondé son « Empire du soleil » sur l'erreur, voire le mensonge, il a fourni à l'occitanisme tout ce qu'il lui fallait pour s'étendre à son tour à tout le monde d'oc;
– soucieux de plaire et d'être applaudi, il a servi à ses auditoires le discours qui plairait; il en résulte une successions d'à-peu-près et de contradictions qui empêchent de mettre noir sur blanc un « Symbole » qui condenserait la pensée de Mistral en un nombre réduit de propositions;
– le Félibrige, en feignant de s'appuyer sur cette indéfinissable « pensée de Mistral », est un bateau sans boussole, balloté par le mouvement des idées, et pire encore par la disparition inéluctable des langues d'oc dans la société moderne.

À mon avis, dans son réduit provençal, ignoré par les occitanistes qui bougent — sauf pour l'inviter à des Béziers et Carcassonne qui sonnent comme Canossa — le Félibrige ne représente plus rien et disparaitra bientôt, avec la honte d'avoir ouvert ses portes à ses pires ennemis. Mais ont-ils entendu parler du cheval de Troie ?

J'ajoute que je n'éprouve aucun plaisir à ce constat.




Jean Lafitte

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