vendredi 20 mars 2009

Voyage vers l'orient : à mi-chemin, l'Acropole d'Athènes




La cicatrice de la bêtise humaine est sous vos yeux... Non pas l'oeuvre, bien sûr, mais sa quasi destruction...

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LI 4 GLÒRI MIETERRANO



Lou blad, l'òli, lou vin & lou la...

Les 4 gloires de la Méditerranée, sans quoi rien ne fut possible, sont : le blé, l'huile, le vin & le lait...

Facteurs de guerres & de paix, voilà le simple essentiel d'un monde éternel & plein de gloire...

mercredi 18 mars 2009

Fé - libre : indépendant...

CATECHISME DOU BON FELIBRE
(extrait)
-
Qu'es lou Felibrige?
- Es l’amo di Nacioun latino.
- Que vòu lou Felibrige?
- Vòu l'unioun de tóuti li prouvinço, de tóuti li Nacioun dóu Mounde latin, souto l'Estello di sèt rai.
- Perqué?
- Pèr que lou Bèn triounfle dóu Mau; lou Bèu, dóu Laid; la Pensado de la Pèiro e dóu Metau; dins
qu'un mot: pèr que la Pouësìo fugue soubeirano sus touto causo!

Le Félibrige pâtit de deux choses :
- son inertie avérée qualifiée, dès les années 1930 par le Docteur Pansier de « mare félibre »,
- sa dérive tendancielle vers le nominalisme (1) du fait de la concurrence des chapelles.
Ces deux situations sont biens regrettables, mais que peut-on demander de plus à ceux que le Maître de Maillane, déjà, qualifia de « sa de garri » (sac de rats)... & qui comme tous les humains subissent l'air du temps.
A ce jour les acteurs des langues d'oc pour les plus jeunes ont 40 ans, les masses sont over 60 ; dans quelques chapelles que cela soit. Le mal n'est pas que là, il fallait malgré tout planter le décor. En fait pour parler d'avenir, il faut connaître son passé réel & pas son ou une idéologie.

Mistral ne fut pas un homme d'idéologies mais de traditions, il eut pu être tenté, en son temps, par le marxisme contemporain voire le monarchisme fédéraliste ou même la république, mais il resta à Maillane surtout il travailla sur l'exemplarité de son oeuvre, de sa tache en regard des grandeurs littéraires symboliques de l'antiquité Grèco-romaine. Qui plus que lui de son vivant fut statufié, non comme prophète ou comme dictateur des consciences, mais comme Homme à la « Foi Libre », une forme de libre penseur par l'exemple de la transmission orale & non par l'idéologie.
Mistral jouait & jouissait de cette gloire, par ces temps jacobins. Lui le fils des mas, lui le « poète », même le président de la république venait le voir à Maillane... pas l'inverse. Pourquoi?? Par peur ??? Peut être, mais pas par plaisir...
Depuis, qui en France eut une telle aura, tant dans le mouvement littéraire ou traditionnel voire dans le mouvement régionaliste??
Personne. D'ailleurs; à juste titre il ne s'est pas compromis avec quiconque du point de vu politique ou social sauf à Maillane tantôt royaliste tantôt républicain, mais là nous sommes plus dans la galéjade locale. Loin de lui les tendances à la collaboration, aux pactes de (types germano-soviétique ou avec l'occupant), loin de lui les compromissions catégorielles ou professionnelles. Et pourtant les mineurs se jetaient sous les roues du Train pour l'empêcher de partir de la Grand- Combe, plus de 10000 Personnes à une de ses arrivées à Montpellier, ne parlons pas des arènes d'Arles...
Et pourtant ce petit peuple du midi, fait pour la plupart d'illettrés, avait vu en lui, leur héros, leur héros antique... Il se permit le luxe, à juste titre, de ne pas soutenir les événements de 1907...
Alors, la télé ou la radio n'existaient pas, sinon il y aurait eu une chaîne Mistral & pas ¾ d'heures de « lengo nostro » en fin de semaine comme aujourd'hui... malgré que cela soit déjà quelque chose. Mais ne nous contentons pas du "moins" ou du" petit peu". De tout cela qu'en retenir, l'histoire même si elle bégayait ses mauvais moments, elle ne se répète pas. Attendre une réincarnation de Mistral est une expectative que je laisse aux adeptes des croyances orientales... Mistral ne fut pas imbu au point de croire qu'il fut une fin en soit mais plutôt un exemple à suivre, même pas un messie, cela est plus certain. Donc ne le mythifions pas mais suivons son idéal poétique.

Alors pourquoi Félibre Indépendant ?

D'un coup de « bringue » en mai 1854 l'on se positionne, parmi la multitude comme représentant, docte, d'une pensée???
Pour bien fixer ma réflexion, je n'ai rien contre le Félibrige, j'en suis, j'en suis fier & j'y resterai. Pourquoi une organisation quand c'est de l'oeuvre & de la responsabilité de chacun de faire avancer les choses ? Pourquoi vouloir donner ce sens académique qui n'en est pas un, voire cette fédération d'écoles et d'êtres qui sont un « sac », une « mare » ou un « monolithe » inerte & mou ?

Mon propos même s'il se fonde sur le passé & le présent, n'a que de vocation pour le futur.
Futur des consciences, liberté des esprit, foi en la liberté, & surtout indépendance des esprits... Ne pas essayer de mimer un centre de la pensée ou de la mode intellectuelle qui n'en est pas un. Les humains du sud de la Gaule, ont dans leur originalité & leur inconscient collectif, l'esprit de liberté en dehors du grégaire, qui est plus du fait de la germanité. Cet amour de la liberté a donné au monde, les Zola, Fabre d'Olivet, Jean Jaurès, & Combes,... qui ont fait la grandeur de notre pays mais aussi la ruine de leur « païs » natal en faisant d'un mode particulier d'être une règle commune, qui en se transformant pour la généralité, perd sa sève originelle.

Les pays de langues d'Oc n'ont pas eu besoins de Centres, de Noms, de Référants idéologiques. Seule la transmission orale du temps, la métaphore des mots & l'éclairage du soleil suffisent pour faire grand un peuple.
Les écoles, la doctrine, la chape du savoir anéantissent & nivellent par le bas, surtout soumettent la pensée, aux pensées uniques & liberticides : Le livre ou/& la lettre contre l'esprit...
Le sud c'est la science, c'est l'art royal du mystère et de l'esprit, le contraire de la technique froide qui conduit à la soumission... Notre sud, notre lieu de vie, c'est le chemin de la naissance à la mort, c'est aussi le contenant qui est universel & non le contenu qui n'est que personnel & matériel...

Libérons nous du mal, de l'ignorance, que chaque Félibre, femme ou homme libres aient valeur d'exemple par leurs faits, actes et accomplissements.
Que la liberté & l'indépendance qu'ils insufflent dans leur travail, soit leur foi dans le futur et celui de leurs semblables.

Surtout que le Félibrige soit un lieu d'échange & non plus de confrontation pour avoir une cigale ou une pervenche, signes distinctifs de peu de chose à ce jour. Que les autres courants de la pensée des pays d'Oc ne soient plus pour leur paroisse mais pour le bien public & surtout l'intérêt général en se référant au passé sans pour autant le déifier, tout en oubliant la querelle obsessionnelle pour avoir quelques subsides ou pire quelques miettes d'un état méprisant.

Tous ces mots je les écris en souvenirs de notre cher Emile Bonnel qui par son travail exemplaire d'homme libre, doit avoir valeur d'exemple pour le futur... pour nous tous & surtout les futures générations.


Avignon 05/02/09 -  18/03/09

(1) qualifié récemment par A Costantini dans Li Nouvello de Prouvènço.

Jan Castagno : un cévenol "Mascle"



Jan Castagno a décrit, a écrit un monde. Disparu, ce mode d'être, cet esprit de la vie, dur & sans pitié, nous arrive grace à ses nouvelles, pièces, ... Témoignage d'une terre; d'un temps passé.
Julien Brabo Alias "Jan Castagno" naît le 16 octobre 1859 à la Vabreille, commune de Saint-Martin-de-Valgalgues. Il meurt à Alès en janvier 1938. D'abord apprenti imprimeur à Montpellier, typographe à Alès, puis maître imprimeur, il créait plusieurs journaux ; Le Tourbillon - La Lorgnette Alésienne - Le Pays Cévenol - Cacalaca. Ce dernier rédigé en dialecte cévenol. Chef de l'Escolo de 1a Tabo, majoral du Félibrige en 1931 (il est le dixième élu) il le demeure jusqu'à sa mort.

LOU TROUPÈL AU CARNIÈ

Lou troupèl que menavou au tuiadou l’ai vist passa, l’ai un long briéu segui. L’ai segui, doulentas, sus la draiasso roujo, dins un fum de poussièro assecairouso. Alassas, babous, tèsto au sòu, fataus, lous bedets resignas se rebalavou; lus milo ferraios, lus milo sounaios drindavou sournament lus clas.

Tres pastras, pautus, palamards, lous menavou. Un vièl acaba, la pèl cuiecho, souliès ferras, tiravo davans; dous autres, gras e roujinous, per darriès lou fouitavou. Cinq chis, couliè de cuer, pèu aigre, dènts regaugnairos, lou dountavou.

— Bee! bee! coumo fau marcha vite?
— Bee! bee! mai ounte dounc nous menou? s’hou fasièu lous bedigas engouissous.
— Brrr! Ha! Hi! Brrr! as cops de fouit charpavou lous menaires.
E dins un risible e terrible enavans, touto la chourmaiado empoussièirado, faguent
qu’un blo preste à sanna, trissavo de pebre sus la routo enfióucado.
— Beee! bee! avèn se! avèn fan! avèn som!
— Brrr! que sai-sèn! Ardit! Ardit Farot! Viro Cadet! Ha! Hi! Brrr!
E lou pourtalas dau tuiadou s’es dubert... e lou troupèl, esquicha vèntre à vèntre, dins l’espavènto s’es percipita...
— Bèè! bèè! coumo aici tout pudis lou sang!...
— Bèè! bèè! aici pertout la mort trèvo... Paures de nautres... O beus agnels! innoucents agnelets sans taco! Adiéu-sias! adiéu-sias! o pradariès dalos, serres erbous,mous serres erbous, jamai pus las broustiharen tos prefumados frigoulos! Oh! per acò! dejà lou sang tracholo! Oh vejo aqui per que dounc sèn vengus Ah! que pau causo es nosto vido!

E lou sang sanno, rajo, pisso, enjipo. Tout bialo, juro, japo, idoulo, tout ferraio, cridaio, piaio!
— Segas encaro urouses de mouri, s’hou fan, risèires, lous sannaires!… que vosto
carn tendreto vai servi per nourri lous souldats de l’armado dau DRET.
— Coumprenen res à vostos dichos! an respoundu lous agnelous; nous sèmblo à
nautres que lou dret, que noste dret seriè de viéure! Mè, pamens, pèsqu’ afourtissès la
verita de vostos dichos... vautres, pastres, que savès tout, saique dirias pas de messorgos, quand s’agis de tout noste sang... Alor que siegou benesis vostes engins estripaiaires!

L’endeman, dau poulit troupèl, de-que n’en soubravo? Las pèls à seca sus de cledos
pudentos! car, hou savès, dau cabau tout servis; n’es pas aici coumo de l’ome qu’entre
qu’es mort lou cau gara d’aqui.
La carn das bedigas nourrira lous souldats — lous souldatets gue mouèrou per lou
dret, — per lou dret de manja la carn das troupèls que van au carniè...

E la sourneto recoumenço.

lundi 16 mars 2009

Ive Gourgaud : ISAAC SINGER & L’ « ART DE FAIRE RACONTE »


Yves Gourgaud n'est plus à présenter sur ce blog, Velave du Puy, pluri-doctotat ès lettres, professeur de provençal, il nous commente, ici & en lengo nostro ou Provençal, l'oeuvre du prix nobel de litérature 1978 :


ISAAC SINGER E L’ « ART DE FAIRE RACONTE »


L’an 2004, que marquè lou centenàri de noste Prèmi Nobel, tambèn marquè lou centenàri de la neissènço d’ Isaac Bashevis Singer (1904-1991), que coume Mistral escrivié dins uno lengo dicho « minouritàri », lou yiddish, e coume Mistral daverè lou Prèmi Nobel de Literaturo (en 1978).
S’ameritarien d’èstre miés couneigudo encò nostre l’obro e la pensado d’un escrivèire que se disié, simpletamen, « countaire d’istòri » e que se mesfisavo dis inteleituau que voulien -e qu’encaro volon- gibla la literaturo souto sa lèi.
« Quouro la literaturo se fai trop inteleitualo, quouro descounèis lis emoucioun, se tourno esterlo, bèsti, boufeto », disié Singer (1)
Es aqui que poudèn senti la grand proussimita entre l’art yiddish de Singer e l’art prouvençau di mistralen, pèr countraste à l’iper-inteleitualisme di prouducioun óucitanisto. Es pèr acò tambèn que la meno d’ « art de faire raconte » qu’escriéuguè Singer pèr presenta soun antoulougìo de conte s’amerito d’èstre legido e meditado pèr quau vòu countunia de faire de nosto Literaturo uno creacioun vivo e óuriginalo, foro di campèstre ja passi de la pretendudo moudernita à la modo óucitanisto (2) :

« En coungreiant /mi raconte/, prenguère counsciènci dóu mouloun de dangié que gueiron l’autour de ficioun. Li mai marrit soun aquésti :
1.l’idèio que l’escrivèire déu èstre un soucioulogo o un pouliticaire, e que ié fau se jounta à ço que se souno « dialeitico soucialo » ;
2.l’amour de l’argènt e de la recouneissènço inmediato ;
3.l’óuriginaleta fourçado, e mai escassamen l’ilusioun qu’ uno retourico espoumpido, d’inouvacioun pretenciouso dins l’escrituro e de jo de simbèu afeta , poscon espremi la naturo proumiero, de-longo cambiadisso, di relacioun umano, o s’endeveni emé li coumbinesoun e li coumpleisseta de l’eredita e de l’envirouno.

Aquésti debaussadou verbau de l’escrituro sounado « esperimentalo » venon gasta fin-qu’i talent vertadié ; avaliguèron uno bono part de la pouësìo mouderno, en la faire veni escuro, esouterico, sènso agradanço. L’imaginacioun es uno causo, e lou bidoursa de ço que Spinoza sounè « l’ordre di causo » n’es uno autro, d’à-founs dessemblanto. La literaturo pòu forço bèn descriéure l’assurde, mai jamai dèu èstre assurdo elo-memo.

Emai lou raconte noun siegue en vogo à l’ouro de vuei, encaro crese qu’es éu l’escoumesso artimo pèr l’escrivèire creaire. Au contro dóu rouman, que pòu embéure e meme perdouna lis estraviage loungaru, li flashback e uno coustrucioun lasco, lou raconte de-longo déu avé pèr amiro direito soun apougèu. Déu poussedi uno tendesoun e un suspèns noun derroumpu. En mai d’acò, lou courtige es sa propro essènci.

Lou raconte déu avé un plan defini ; noun pòu èstre ço que se souno « taioun de vido » dins lou jargoun literàri. Li mèstre dóu raconte, Chekhov, Maupassant, coume tambèn lou sublime autour de l’istòri de Jóusè dins lou Libre de la Genèsi, sabien just-e-just pèr ounte anavon. Li poudès legi e tourna legi, jamai noun vous enfetas.

La ficioun en generau déu jamai èstre analitico. À lou bèn dire, l’escrivèire de ficioun déu manco pas tenta de se bouta dins la sicoulougìo emé tóuti sis –isme. La literaturo vertadiero assabènto e espassejo dins lou meme tèms. Capito d’èstre pèr ensèn claro e prefoundo. A lou poudé magi de foundre l’escasençous emé l’óujeitiéu, la doutanço emé la fe, li passioun de la car emé li desiranço de l’amo. Es unico e generalo, naciounalo e universalo, realisto e mistico. Vòu bèn èstre coumentado pèr d’autre, mai jamai noun assajo de s’esplica elo-memo.

Aquésti verita evidènto, fau li tourna dire amor que la fausso critico e la se-disènt óuriginaleta creèron un estat de desmemouriamen literàri dins nosto generacioun. De tant cerca lou message, i’a forço escrivèire qu’óublidèron que counta d’istori es la « raison d’être »(3) de la proso artistico.


I.B.S., lou 6 de juiet de 1981.

(Reviraduro facho à Brasilia , óutobre de 2004.)

NOTO

1)I.B.Singer, 47 contos, Companhia das Letras, São Paulo 2004, p.11
2)Ço que mai desseparo nosto literaturo de l’óucitano es tout-bèu-just acò : l’óucitano se vòu « mouderno », mai la literaturo prouvençalo mistralenco fuguè, tre la debuto, uno literaturo post-mouderno, voulènt-à-dire en acourdanço emé la sensibleta de noste tèms d’aro. Subre la question de la post-moudernita, vèire Michel Maffesoli : La part du diable, collection Champs, Flammarion 2002.
3)En francés dins l’óuriginau.

vendredi 13 mars 2009

Une recette de cuisine en vers??? La Bourride de Baudroie à la languedocienne.


Vendredi jour du poisson : pour celles & ceux qui font carême, mais aussi & surtout pour tous les amateurs de poisson, une recette traditionnelle du Languedoc culinaire, Bon Profit!!!, comme disent les catalans.


La Bourrida de Baudroie

Aici i'amai un plat de Ceta
Famous, mès un pauc coumplicat;
Per qu'intre dins vostre sicat,
Escoutàs ben ma liçouneta :

Prenès dau peis à proupourcioun
De tres quart de liura per tèsta,
Rous coueta longa, e, sans façoun,
Pelàs, vouidàs. Lou fege rèsta.

Porres, erbas à voulountat,
Grels d'api, cebas ben achadas,
Lou peis à moussis decoupat,
Aqui vostra caissaroulada.

D'òli, metes un rach au founs,
Un jas de peis, un jas d'erba,
Pauc de sau, de pebre à bourroun,
D'als ecrachats, lou fege en serva.

D'aiga que couvrige lou tout,
Pioi fioc, que per dessus s'enaussa;
Mantenès un lou boul jusquau bout
Dau tems qu'alestissès la sauça.

Amé qu'aucas besegnas d'als
Dins lou mourtiè mountas d'aiòli;
Cau que la sauça tengue as tals,
Tamben ie planigues pas pas l' òli.

Quand lou fege es quioch, lou tiràs,
Dessarcissès dins una sièta,
Am'un pauc d' òli, lou mountas :
Es ce milhou de la recèta.

Tant lèu qu'es frech, douçament,
Dins lou mourtiè que se desola,
Mesclàs lou fege amé l'aiet
Pioi, retiràs la caissarola.

Prenès de jus ce que vous cau
Per que la sauça s'espessigue,
Dins lou mourtiè, pauc après pauc,
Mountàs, jusaqu'à que se rampligue.

Un amic vous tèn lou mourtiè :
Zou remenàs la caissarola !
Cau que chaca tal lou entiè
Porta sa sauça tron de moila !...

Après, s'avès boun apetis
Vous creirés au Paradis.

F. Combes ( 1903)
dins l'Armanac Cetori 1904

mercredi 11 mars 2009

P. Azéma : La "Grande Guerre", grande pour qui ? Misérable pour tous.... A bas la guerre!!!!


Dans ce texte de 1918, en languedocien de Montpellier, l'essayiste P. Azéma, Félibre & intellectuel clapasien, fait honneur aux morts de la guerre 14-18... Son lyrisme languedocien est presque Wagnerien. Ce texte est extrait de ses écrits de guerre recueillis dans " à boulets rouges" ...

LOUS MORTS

I’a ‘no causo que li mort nous demandon, e que li mort i’an dre, quand soun toumba dins la bataio: acò ‘s la remembranço, tout ome que defènd lou sòu de sa patrìo, que lucho e mor pèr elo, merito, longo-mai, la remembranço dóu païs.
(F. MISTRAL, Discours e Dicho.)

Sus la toumba de nostres grands Morts, sus la pèira santa que, pèr toujour, garda lou som vitourious das martirs de la pus nobla Causa, un cop de mai clinan l’oumage de nostes cors recounouissents. Chaca an, dempioi quatre ans, renouvelan la fiertat e la tristessa d'aquel pelerinage pietadous. Das cementèris siaus e flourits de l'arriès, nostra pensada landa dors las planas dau front, nusas e silenciousas, ounte s'aubouroun, dins sa magrou d'escaleta, lous batalhouns inmoubiles de las milanta crouses negras; e, mai liont encara, vai jusquas as camps batalhès qu'an enselepit tant d'eròs dins lou soul susàri de sa glòria e de soun sacrifice.
Mès, aqueste an, l'oumage vèn pus soulenne e pas pougnent encara, s'es poussible. E nous sembla que la fiertat e la tristessa an grandit, ara que lous rais de la vitòria illuminoun tout noste ourguiol e qu'esclairoun touta nosta doulou. Sentissèn milhou, ioi, lou pres de tout ce que duvèn as luchaires erouïcs qu'an gagnat aquela vitòria, as qu'an dounat sa vida pèr basti l'aveni, as oubriès noun pariès de l'obra de Liberacioun, que l'an sinnada emé soun sang.
E dire que veiran pas soun obra coumplida, que sous iols barrats dins la visioun de la batèsta ourribla, clugats à jamai, countemplaran pas la radiousa sourelhada que vai daurà de glòria l’azur de nostre cièl. Aqui nosta granda, nosta inmensa tristessa... E, tant pis pèr quau ausarà dire de nou, farà pas que creisse, à mesura que s'amadurarà dins la joia dau triounfe, la meissou qu'eles an semenada dins la soufrença das coumbats.
As que tastaran pas lou pan salabrous de la vitòria, garden touta entièira l'ounou de nous l'abere pastat. Ié la rauben pas en lous dessoublidant. Reneguen pas lou noum sacrat das que nous an quitat lou pus bèl eritage.
E preguen nostres Morts, en flouriguent lou cros ounte dourmissoun, de mantène nostras amas à l'aussada de soun esemple e de sas liçous.


Nouvembre 1918.

dimanche 8 mars 2009

Alain Guttadauro : Naissance




Alain Guttadauro, journaliste, prosateur, poète à ses heures. Il s'essaie aujourd'hui sur un thème qui est cher à son coeur & à son esprit. Grand lecteur de poésies persanes, il touche en plein la métaphysique de l'existence par ce texte profond sur l'être.



Naissance


Crépuscule testamentaire. Juste un petit sourire pour vous désoler de ma dé-existence. J’entre dans l’absence de ce que je fus. Une absence que vous habiterez comme bon vous semble. Prenez mon corps. Punaisez-le sur le mur de vos souvenirs ou encadrez-le dans un grenier abandonné. Appropriez-vous ma mémoire aussi. Dépoussiérez-la de temps en temps ou laissez-la moisir dans l’oubliette de vos cœurs. Faites ! Disposez du tout. Je ne veux plus rien savoir. Tout est vôtre. Tout ce que je fus est vôtre.

Nuit mourante. Ma vue accorde un ultime regard aux étoiles, tissées de fils d’or avec mes illusions. Au fin fond de cette nuit, j’aperçois l’autel de mon existence. A ses pieds, j’y dépose mes masques. Puis je m’allonge sur un lit d’apparats. Aussi nu que la vérité principielle. L’inaudible me recouvre de son manteau d’Hermite. Et je m’endors sur l’oreiller de la multiplicité de ce que j’ai été.

Aube naissante. J’ouvre les yeux. Mon cri de nouveau-né scelle définitivement hier. Emoi. Je suis vrai. Je m’éveille à moi. Et en moi, le tout s’éveille. La réponse n’est plus « qui suis-je ? ». La question est : « je suis ! ».


mars 2009

samedi 7 mars 2009

Un premier débat de société : les éoliennes dans la Crau


Vrai progrès social et marche vers un monde meilleur ou énième machine à fric d'un système qui végète, à partir de la situation en Crau une question se pose aux habitants de la Provence. L'Or Vert des énergies propres avenir ou serpent de mer pour le futur de la terre de Mireille & Vincent, 150 ans après, avès la paraulo ????????

Après la poésie (voir l'article ci-dessous sur Farfantello), Marie-Noëlle Dupuis nous propose de dire la notre sur le sujet des Eoliennes , Eouliano en prouvençau, ce sujet nous concerne tous...voilà sa contribution au débat: "Siéu en iro, devourido de vèire lou bestige uman, d'ingeniaire que planton lis eouliano; la Crau lucho contro lou vènt emé sis aucèu grandaras. Es leidas e sèr à pas rèn."
"Il y a des jours où je suis de mauvaise humeur, quand me promenant à travers la Crau, je vois de gigantesques aiguilles qui tricotent le vent et déchirent le voile d'azur, une maille à l'endroit, une maille à l'endroit, une maille..... ad vitam aeternam. Les éoliennes, serres acérées de ptérosaures qui griffent la voûte étoilée, insupportables mécanismes qui défigurent notre paysage, avec un rendement qui laisse à désirer".


vendredi 6 mars 2009

Henriette Didon dit "Farfantello"


Une suggestion de
Marie-Noëlle Dupuis, syndic de la Maintenance du Languedoc du Félibrige.
Marie-Noëlle considère que
Henriette Didon dit "Farfantello", fut incarnation & prémonition des idées de Liberté de la femme bien avant 1968.
"Enrieto DIBON represento pèr iéu la femo libro, la femo d'avans-gàrdi avançaire bèn avans 1968."
Farfantello a pour nous, double valeur : Provence & Liberté, qui sont souvent synonymes....



Gilbert Thévenard : LA MONTAGNE SACREE



Instituteur, résistant, défenseur ardent de la laïcité, Gilbert Thévenard nous parle à travers ce poème, de la Ste Victoire, je le cite : "montagne" avec laquelle j'ai pris "rudement " contact et connaissance il y a plus de 50 ans.
Par ses écrits poèmes & pièces de théâtre, il recherche l'exaltation de la Liberté, de l'humanité libérée...



LA MONTAGNE SACREE


La Montagne sacrée est belle à l’horizon,
Haute de tant de siècles et de dur labeur,
Sommets impressionnants, parois vertigineuses,
Lentement, pierre à pierre, en patience élevée…

La Montagne sacrée est bleue à l’horizon,
Couvertes de prairies et de fleurs d’espérance,
Le soleil y forme des havres de lumière,
L’air sent la marjolaine, et le thym, et l’ivresse…

La Montagne sacrée est rouge à l’horizon,
Faite de tant et tant de souffrance endurée,
Baignée de tant de sang et d’espoirs enterrés
Où le cœur est réduit comme l’âme asservie…

La Montagne sacrée est blanche à l’horizon,
Elle fume encore de funestes combats,
Ses reliefs tourmentés, ossuaires gigantesques
Rappellent tant de morts à tant de morts mêlés…

La Montagne sacrée est noire à l’horizon,
Car la colère est née et court dans la vallée,
Les torrents emportent mille rêves de paille,
Puis brusquement calmés, retournent dans leur lit…

Bientôt, ayant gravi la Montagne sacrée,
Parvenu au sommet, entre hier et demain,
Planté dans le terreau né des générations,
Tu te projetteras dans ton propre voyage…

Alors, pense à tous ceux qui t’auront précédé,
Ceux qui ont espéré et qui n’ont pu goûter
L’amour, la liberté et la fraternité,
Et forge de tes mains un nouvel arc-en-ciel…



mardi 3 mars 2009

une autre vision sur Frédéric Mistral



Moins poétique plus terre à terre, une idée de la pensée du jeune Mistral, peut être de son instinct de provocation? Plus tard, il fut conseiller municipal royaliste de Maiano! Frédéric Mistral écrivit...


...à Roumaniho - Ais de Prouvènço lou 9 de jun de 1849


Il est bien évident maintenant que la droite de l’Assemblée, c’est-à-dire les blancs, les bleus, les faux-républicains, enfin tout ce qui s’intitule honnête et modéré n’est qu’une horde de brigands qui ne tendent qu’à traîner la France dans la boue, à avilir cette sainte République qui, à sa première apparition, fit dégringoler six rois et qui maintenant n’est plus qu’une fragile poupée que le moindre roitelet peut braver et brave impunément.

Il est bien évident que ceux qui votent contre l’abolition de l’impôt du sel, des lettres, des boissons ne sont pas et ne peuvent pas être les amis du peuple. Vous me disiez quand je vous vis que les romains, Mazzoni, Garibaldi et autres gaspillaient et vendaient tous les chefs d’oeuvre de la ville éternelle; eh bien! cher ami, nous allons voir si le boulet qui va ravager le Vatican et Saint-Pierre sera romain ou français, nous allons voir quels seront les vandales, des révolutionnaires romains ou du général royaliste Oudinot.

Vous me reprochez d’être trop rouge. Eh! diable, comment voulez-vous que je ne vois pas rouge sang-de-boeuf, quand je vois nos honnêtes modérés, Odilon, Thiers, Berryer, Falloux faire monter la garde au pied des Alpes à notre brave armée, tandis que Radetzki met la belle et malheureuse Italie à feu et à sang, galopant avec ses Slaves sur les ruines fumantes de Milano, Peschiera del Garda, Padova, Verona, Alessandria, Genova, Bologna, Ancona, Senigaglia, Firenze, Livorno, etc… pillant, violant, détruisant tous les plus beaux vestiges que l’art ait laissé dans le monde, et le Pape soutirant les quêtes de l’Irlande affamée, pour soudoyer les spadassins qui vont rétablir ses armoiries par les villes saccagées par l’autrichien!

O abomination! Et un Pontife du Christ qui ne devrait avoir qu’un bâton et des sandales, un Pontife qui a empêché ses sujets de voler au secours de Milan assiégé par les Slaves, ne va pas s’interposer entre 2 armées, venues au mains pour sa propre cause, entre ses sujets qu’il appelle des bêtes féroces et ces mêmes Slaves qu’il appelle ses très chers fils en J. C.

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lundi 2 mars 2009

Philippe Chauché : Tango !

(Libertad Lamarque)

Philippe Chauché
: Journaliste, aficionado, passionné d'arts, de textes, de musiques... Philippe mit dans ce texte le meilleur de ses ressentis passés, présents, futurs,...? Il fait de l'esthétisme sa raison d'être, il prêche cette volonté par ses mots.
Il lut ce texte en septembre dernier au cloître des Carmes d'Avignon dans une mise en scène de Contra Luz.


Tango !

Dédicace de l'auteur : " A Agnès et Nathalie compagnes de cette lecture musicale - Avignon 12 septembre 2008".

C'est au café Tarana que tout a commencé, c'est là au café Tarana que je rencontrai pour la première fois Angel Villoldo, Ada Falcon, Homero Manzi, Hugo del Carril, Anibal Troilo, Enrique Cadicamo, Angel Vargas.
Ils s'étaient donné rendez-vous dans ce café où s'entassait dans la salle du fond toujours aussi enfumée tout ce que Buenos Aires comptait d'amateurs de tangos, de rancheros au chômage, de putes en vadrouille, de bourgeoises excitées, de chanteurs sans voix, d'écrivains en manque d'inspiration, de journalistes fièvreux, de musiciens à la recherche d'un hypothétique engagement et de touristes français persuadés toucher enfin de prés l'âme du tango.
Là tout au fond de la salle sur une estrade de bois vermoulu, c'est là qu'ils les attendaient : Pédro déployait son bandonéon, comme un éventail et attendait qu'il absorde tout l'air du monde pour l'offrir pour rien, pour la musique, pour le Tango. Pour l'offrir à ses compagnons, à sa fiancée qui n'était plus sa fiancée depuis hier soir, elle avait disparu du café au moment où Pédro faisait exploser les notes de son bandonéon, il n'avait jamais joué aussi bien.
S'écartant un temps de la mélodie, la déchirant, la détruisant dans des soubresauts étranges venus dont ne sais où. Lorsqu'il avait levé la tête et que Vicente reprenait le thème au violon, il l'avait apperçue au bras d'un bellâtre gominé au costume rayé et aux chaussures blanches, plus plus rien. Il repris la mélodie et joua comme jamais ce tango incroyable qui ne parlait que de ça, de trahisons, de disparitions, de la folie des femmes et de la stupidité des hommes.
Bien, se dit-il, je suis devenu ce soir le numéro un du bandonéon, el numéro uno, et oui ma belle tu aurais du m'écouter jusqu'au bout, mais tu n'as finalement jamais rien compris au Tango, rien compris à la musique, file et sois heureuse. Vicente avait posé son violon, El Gato allumait une nouvelle cigarette et se raclait la george, il allait leur montrer ce que c'était que chanter un Tango. Et pour la nostalgie, ils repasseront. Blas accordait sa guitare, sans s'occuper de ce que pouvait dire Pédro, il s'en moquait, il jouait, il jouait en attendant de s'embarquer pour Paris. Eux ils savent ce que c'est que le Tango, c'est pas comme ici se répétait Blas, des ploucs qui préfèrent boire et embarquer des filles que d'écouter ce qui se fait de mieux à Buenos Aires. Qu'ils aillent au diable ! Ils ne comprennent rien au Tango, l'Argentine a perdu la mémoire, la mémoire de son histoire, la mémoire des chanteurs, des musiciens, des poètes. Elle s'est vidée, comme se sont vidés les coffre forts des banques.

C'est là dans cette salle du fond du café Tarana qu'il s'est saisi du micro, son bandonéon pendait à sa main droite et comme il le faisait souvent lorsqu'il jouait il a laissé coulé les mots comme des notes. Blas oublia Paris, Vicente fit voler son violon, El Gato chanta comme jamais on n'avait chanté au Café Tarana. Le Tango, le Tango, tout était Tango à cet instant; Tout, la musique, la danse, la poésie. Puis la musique stopa net et il repris : « le Tango, c'est tout cela mes amis, la musique, écoutez ! La danse, regardez ! Le chant sauvage, l'amour, le corps libéré, la peau sauvage, c'est tout cela le Tango ! Mais aussi le sourire de cette femme qui m'écoute, là, personne ne peut la voir sauf moi !
On est tangero toute sa vie, dans toutes les langues du monde ! On est Tangero sans patrie ! Regardez-moi, je suis argentin ! mais aussi italien, espagnol, français ! Je suis la musique, la danse, le chant, je suis la poésie de Buenos Aires, je suis le tango ! Le tango c'est ce paradis inspiré, cette saveur du rio plata, c'est Buenos Aires et Paris c'est Madrid, Berlin et Londres. C'est l'Argentine qui est à cet instant devenue la terre, toute la terre, c'est une boussole dont l'aiguille indique toujours le tempo, l'allegria ! Le tango c'est une musique de voyous interprétée par des aristocrates et inversement ! Le tango transforme ta vie, transforme ton corps ! » Plus personne ne parlait, tous le fixaient sans bien comprendre ce qui se passait, il se rassit et joua les premiers accords d'El Ezquinazo, les autres le suivirent et aucun ne joua aussi merveilleusement que ce soir là et lorsqu'ils s'arrétèrent, pas un bruit, pas un applaudissement, le silence.

C'est cela aussi le Tango, le silence avait dit Pédro c'est la mémoire du Tango !

dimanche 1 mars 2009

Georges Blumberg PALESTINE - 1946 (Extraits)


A la fin de la guerre 39-45, Georges Blumberg (1904-1987) décide de quitter la France pour une installation non juive en Palestine. Il entretient une correspondance avec son ami d'enfance resté à Paris… Plus de 60 ans après, la même actualité nous tient.

Juillet 2008, son fils, Pierre Blumberg, a donné lecture de ces lettres dans le cadre du Festival Off d’Avignon. C'est lui qui nous confie & nous propose ses extraits.


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Extraits des lettres des 16 et 17 mai 1946

Journée du lundi 6 mai 1946 (lettre du 16 Mai)

Licoah,

Tu sais, dans l’ensemble, il y a ici un machin JUIF, JUDEISSIME, JUDEO-JUIF collé sur un pays oriental. Or moi, en gros comme en détail, je ne suis guère venu ici pour avoir la possibilité de vivre juivement en juif une vie juive. Rien n’est plus loin de mes désirs, de mes goûts et même de mes possibilités. Je me sens très patriote palestinien, J’adore la Palestine,
Mais je n’ai littéralement rencontré personne ici qui comprenne ce genre de mentalités.
Il serait donc nécessaire que je pusse avoir une situation sociale et économique indépendante de la juiverie locale. Mais comment, tel est le problème qui se pose ?
Quant à la doctrine, la DOCTRINE, notre DOCTRINE, il n’y a rien au monde de plus vrai, de plus juste, de plus exact, de plus nécessaire, de plus inéluctable, de plus millénaire, de plus beau, de plus grand, de plus désirable, de plus enthousiasmant, de plus divin et de plus tout.

Mais ce qui se passe ici n’a absolument aucun rapport avec ça. Ou plutôt n’a que des rapports fortuits, circonstanciels, contingents, géographiquement coïncidents, cérébralement construits et organiquement non enracinés.

Telle est du moins mon impression… première. Sous réserve de correctifs ultérieurs dictés par la reconnaissance du ventre.

Et avec tout cela, mon programme pour la Palestine comprend :

- Un code civil laïque pour tous sans distinction de race religion ou communauté, tout au moins un code civil minimum….
- La liberté d’immigration et tu verras qu’il n’y viendra pas un juif de plus,

- L’instruction publique obligatoire en arabe et en hébreu pour tous sans distinction.


Mais un état juif est impossible par manque de maturité des juifs,
De même, un état arabe serait un foutoir et une farce.
Le meilleur gouvernement serait peut-être une délégation du Vatican, fonctionnant en Latin et en Français…..

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Journée du Dimanche 19 mai (lettre du 17 Mai)

Licoah,

Je te le dis et il faut le faire savoir à ma mère qu’il ne faut pas encore songer à venir ici.
La lecture de mes lettres t’a suffisamment renseigné.
Je suis ici depuis bientôt trois mois et avec les moyens personnels que j’ai et, qui ne sont pas minces à l’échelle des valeurs du pays, et de hautes relations, je suis toujours à l’asile et je n’ai pas encore déballé mes deux uniques valises.
Je n’ai pas d’emploi stable.

Le sionisme est incontestablement une grande chose dans l’esprit et le cœur d’un certain nombre de gens, mais sur le terrain, dans les réalisations et les éventualités, c’est une pauvre foutaise désordonnée, impuissante et bluffeuse et jusqu’à preuve du contraire me paraît contenir le germe de la renaissance hébraïque comme l’Ile de Sainte Hélène contenait Napoléon.
Le yishuv, cette communauté juive de Palestine qui est en gros un quartier juif et qui se prend pour une nation parce qu’il ne sait même pas ce que c’est et à beaucoup d’égard ne veut ni ne peut le savoir, est pourri de cléricalisme inavoué, mercantile et obnubilé par l’argent.

Quant à moi, encore, je m’empresserai de proclamer le contraire quand le yishuv ou le sionisme m’auront fourni ce qu’il me faut.
Mais jusqu’à la preuve du contraire, je vais essayer de me caser dans ce pays en marge du sionisme et du yishuv.
J’aime la Palestine, c’est le pays le plus beau et le plus émouvant que j’aie jamais vu, et, en dehors des machins juifs, l’air en est non seulement respirable mais inspirateur et salubre….

Il se peut que cette tentative d’installation non juive en Palestine ne soit pas réalisable.
En pareil cas, je n’envisage pas de rester dans ce pays.
Je ne sais où j’irais mais je le quitterais,

Et quitterais naturellement en même temps, formellement, physiquement, moralement et autrement le judaïsme, ayant ainsi accompli un circuit nécessaire.