samedi 16 janvier 2010

Ive Gourgaud : AUTOUR DU MEZENC Deux sonnets d’Alphonse Boncompain

.


AUTOUR DU MEZENC

Deux sonnets d’Alphonse Boncompain

Celui qui signait volontiers « Medachi Boncompain » est né et mort (1885-1962) à Yssingeaux, sous-préfecture de la Haute-Loire et capitale du « Velay de-delà les bois ». Il contribua à organiser le Félibrige à Yssingeaux entre les deux guerres, en collaboration avec Boudon-Lashermes qui lui était actif au Puy, dans le « Velay de-deçà les bois ».
Son oeuvre est restée inédite : elle est peu abondante mais de bonne tenue,
comme on en jugera par ces deux sonnets qui évoquent le « roi du Velay », le mont Mézenc.
Nous avons pour chacun de ces sonnets deux versions, l’une datée de 1922 et l’autre de 1926 : nous donnons ici une version qui tient compte des meilleures variantes, sans changer la graphie originale (à part quelques signes diacritiques qui ont pu être modifiés ou ajoutés, pour faciliter la lecture). (Y.G.)



0+0+0+0+0+0+0



Lou Velai

Coumo lou javagnò que jouco per las peiros,
Moun Velai vergougnou, din las bourros dous ciàs,
A escoundiù soun nid, para de tous lous las
Per Mezenc, lou Devès, Mount-Bar et las Bouteiros.

Lou Meigau, em’ sous süs et soun bé Testaouéiro
Planta coumo uno bouéino, en douas parts l’a coupa.
À dreito, la planèzo ount lous vents van treva,
Et vount n’oun veit pertout de clouchiés en prieiro

Qu’accàmpan à liurs peds, coumo de pouzinous
À l’entour d’uno clousso, un troupé de meisous.
À gaucho, s’es cava uno coumbo prigoundo

Ount lou Peui se souleilho, ount s’endert l’Emblavès,
Et vount Leire belhit coumo in d’oulos de foundo.
Amount, lou vieu Pagnat vò pas sarra sous ès.



Notes : javagnò : oiseau de proie ; jouca : nicher ; las bourros : les nuages ; sü (prononcez « chu ») = suc, mont volcanique caractéristique des horizons vellaves (le mot est passé en français régional : « un suc ») ; bé = bèl : « grand », et pas « beau » (qui se dit « gente ») ; pouzinou : petit poussin ; clousso : mère poule ; Pagnat : Polignac, dont on voit le château depuis la capitale vellave ; è : oeil.
Les rimes des quatrains permettent de constater qu’en vellave yssingelais, on ne prononce pas les –s du pluriel.



0+0+0+0+0


Lou Lignou

Davàlis d’ès Mezenc, din Leire vas mouri.
Mas fas tant de ditours, cràgnis tant las drisseiros
Que, d’amount, lou miulard que gaitto lous pouzi
Crei vire de voulans ateiras per las peiros.

Coumo uno grosso ser que dert sous la bruéiro,
T’agroumis aou soulé dinc un leit bian garni
Vount l’auro ni lou frid ne te pòdan sazi.
En toun aiguo souven se sogno la bargeiro.

Lous peissous per tous gours se séguan en troupés.
Emb un riban d’argen ròdis tous veils chastés.
Quant t’agoutto l’eitiu, sias mas un riu que dert.

Pei, t’ivéilhis d’un cop. Et toun aiguo prigoundo
Qu’itqumo de coulèro et colo à pleno boundo
Lavouro lous rouchiés em sa rilho de fer.



Notes : d’ès : particule vellave qui marque l’origine de lieu, ex. « l’aigo d’ès la font », l’eau qui provient de la fontaine ; ditours, drisseiro, vire, frid : notez la réduction à « i » de la diphtongue « ei » ; se sougna : se regarder, et non « se soigner » ; itqumo : notez la tentative graphique pour figurer la palatalisation : en vellave yssingelais, on prononce « ityumo » ; rilho : soc de la charrue (rego> rejo> reio> riho, qui serait la graphie adéquate ici)

.

Aucun commentaire: