lundi 10 mars 2014

F. Peise : LOU GARRI ET L’ELEPHANT - Le Rat & l'éléphant (bilingue français & toulonnais)






LOU GARRI ET L’ELEPHANT
 

FABLO REVIRADO 
DE LAFONTAINO

Un pichounet ratun, sortent de sa garrigo,
Sus soun camin rescontro un Elephant,
Et autant dessena que poou v’estre un enfant,
Vent s’amusar à li faire la figo.
— Te, ve, disie, d’aqueou Caramantran!
Et de que pouarto sus l’esquino ?
Carregeo aqui dessus deis Indos lou gran Kan
Soun chin, soun gat, soun jacquot, sa mounino
Et sa battarie de cousino.
Et piei cadun si mette à ginoux davant d’eou;
Que soun fadas, leis gens, de faire lou beou-beou
Davant d’aquello grosso masso!
Crei dounc de m’esfrayar en tenent tant de plaço?.....
t coumo s’en fasent vo mai vo m’en de brut
Poudias passar per un darut.
Mai tout garri que siou proumetti, s’acot duro,
De n’en faire avalar de verdo et de maduro.
Cresoun beleou que siou la mita d’un... coudoun?
Lou garri n’ero pas au bout de soun sermoun
Que lou gat, sortent de sa gabi,
Li prouve qu’un ratun, mai siegue un beou parlant,
Ero pas tant qu’un Elephant.
Et lou paure ratun fet un pet coumo un babi.



*+*+*


Le Rat & l'éléphant


Se croire un personnage est fort commun en France.
On y fait l’homme d’importance,
 Et l’on n’est souvent qu’un bourgeois  :
 C’est proprement le mal françois .
La sotte vanité nous est particulière.
Les Espagnols sont vains, mais d’une autre manière.
Leur orgueil me semble en un mot
Beaucoup plus fou, mais pas si sot.
Donnons quelque image du nôtre,
Qui sans doute  en vaut bien un autre.
Un Rat des plus petits voyait un Eléphant
Des plus gros, et raillait le marcher un peu lent
De la bête de haut parage,
Qui marchait à gros équipage.
Sur l’animal à triple étage
Une Sultane de renom,
Son Chien, son Chat, et sa Guenon,
Son Perroquet, sa vieille, et toute sa maison,
S’en allait en pèlerinage.
Le Rat s’étonnait que les gens
Fussent touchésde voir cette pesante masse :
Comme si d’occuper ou plus ou moins de place
Nous rendait, disait-il, plus ou moins importants.
Mais qu’admirez-vous tant en lui vous autres hommes?
Serait-ce ce grand corps, qui fait peur aux enfants ?
Nous ne nous prisons pas, tout petits que nous sommes,
D’un grain moins que les Eléphants.
 Il en aurait dit davantage ;
Mais le Chat sortant de sa cage
Lui fit voir en moins d’un instant
Qu’un Rat n’est pas un Eléphant.

JEAN DE LA FONTAINE
Livre 8, fable 15


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