vendredi 30 janvier 2015

Michel Buisson : Discours d’Eirago pèr l’aparamen e la mantenènço de l’encierro à l’eiraguenco - Discours d’Eyragues pour la défense et la maintenance de l’encierro à l’eiraguaise








Discours d’Eirago pèr l’aparamen e la mantenènço de l’encierro à l’eiraguenco



Ço que demandan...

Gèns de bouvino, mantenèire, vengu de tout noste miejour, abali dóu meme la, sian d’uno memo terro, d’uno memo nacioun, ço que demandan vuei qu’un cop de mai lou Miejour es amenaça, es pas soulamen que nous faguèsson toulerànci, que poudrien nous leva tre que se reguignara o que la « prouteitriço » cantara, ço que demandan es que nous faguesson noste dre, dignamen e fieramen, à respèt de nost’eiritage, à respèt d’aquéli qu’ antan se soun dreissa pèr faire bàrri, Moussu Mistral, Jóusè d’Arbaud, lou Marqués e tant d’autre pèr sauva nosto liberta e manteni nòsti tradicioun.

Vaqui ço qu’es arriva, à l’ouro d’aro, au mens tres generacioun, li tres quart d’uno poupulacioun s’esquichon dins li vilo, es à dire que i’a quàsi la mita di gèns qu’an roumpu emé soun biais de viéure ancestrau e que se soun derraba de si racino.

D’aquéu chanjamen, passa de la vido païsano à la vido de la vilo, se n’en soun pas remés, sabon pus de que faire de si vido de misèri, viron, tournon, s’apassiounon pèr de farfantello, de plat de regardello e de vouiage à Pamperigousto pèr assaja de remplaça tóuti aquéli valour perdudo. Alor, desempièi uno vintenado soun intra dins uno epoco de retour à la naturo e que pèr countraste e lou mai estounant es que li messiounàri, li catau li mai arderous soun aquéli que, à l’epoco se soun desparti de la terro di draio pèr lou goudroun de la vilo e que voudrien vuei nous douna de leissoun.

Voulèn pas reveni sus la sempiternalo óupousicioun di gènt de la vilo contro aquéli di campagno, mai i’a uno lougico de tira de tout acò, e la lougico païsano es couneigudo, la lougico voudrié-ti pas que siguèsse aquéli que fan viéure nósti campagno, que soun davans la realita di causo, li païsan, li bergié, li gardian e tóuti aquéli qu’aparon Prouvènço e Camargo, voudrié-ti pas que siguèsson éli qu’aguèsson priourita pèr douna lis avis valable sus la questioun.

Mai noun, l’óupinioun publico se fai pas vers nous autre, se fai de mounte parton lis emissioun de televisioun, li rumour, soucitouso que d’uno causo, de poupularita e de faire de bèu-bèu à la majourita. Aquelo majourita coumpausado d’aquéli que volon rèn saupre qu’en Africo i’a la secaresso e que crebon de fam mai que soun esmougu pèr lou sort di canard tre que fai trop fre, d’aquélis autoumoubilistoque cridon à hue e à dia tre que veson un fourestié que copo un aubre, acò pèr faire regreia la fourest e qu’emé lou gas de si veituro n’enpouisounon li bèsti e li planto e d’aquéli « Roubinsoun Crusoë » dóu dimenche que fan pas meme la diferènci entre de blad e de civado.

E lou mai es que soun qu’un meseioun, un meseioun e pèr se n’assegura, lou cridon bèn fort e que i’a rèn de miéus que ço que fan. Lou meseioun ! Mai nous autre, lou saben proun qu’es dins lou meseioun que i’a lou verme ! 

Avèn rèn contro éli, mai que vengon pas nous dire ço qu’avèn à faire, n’en gagnon toujour que mai, soun toujour que mai noumbrous, es verai, se soun fabrica uno culturo que ié couvèn, vai bèn ! Mai, an pamens pas pèr autant lou dre de dispausa de nous-autre quouro ié pren l’envejo de nous amenistra uno soulucioun finalo « bèn pensanto ». Nous sèmblo que poudrian nous metre d’acord e qu’uno relacioun bèn assetado entre nous autre sarié necite à l’espandimen de la soucieta. Redurre lou Miejour à la souleto fin de li faire manja, de ié servi de passo-tèms e de bagno-quiéu dóu tèms di vacanço sarié un apaurimen dramati. Déu i’agué autro causo qu’aquel estamen di causo, es tout un sistèmo de valour, uno culturo elabourado à cha pau à n’un’epoco mounte nòu persouno sus dès travaiavon à la terro e nous autre, nous autre avèn touca l’eiritage de tout acò, d’un sabé, d’usage, de tradicioun, coume uno filousoufìo d’un mounde, d’un art de viéure à faire lingueto e à tóuti li rèndre jalous.

Sian qu’uno minourita, sian quasi à mand de cabussa, un genoucide, un genoucide culturau es à mand d’esvali tóut’aquéli valour majouro. La bataio es pas gagnado, li mot soun pas trop fort mai lis avèn vist arriva e s’istala, nous coulounisa e nous rousiga plan-plan, arougant, en pretendènt nous impausa emé sis idèio, uno vesioun di causo qu’à rèn de vèire emé nosto culturo.

Sian pamens nous autre lis eiritié, lis enfant dóu Diéu Mithra, li depousitàri d’aquelo culturo, d’aquéli tradicioun e bèn mai, de forço esperitalo e acò vau bèn mai que touto uno armado ! E se tóuti tant que soun, e li vese aqui escoundu au mitan de nous autre, e se tóuti tant que soun an sis usage e soun biais de viéure, se devèn de faire assaupre que nous autre avèn li nostro. Sian uno eissepcioun, sian uno eissepcioun culturalo, grand bèn nous fague, lou cridèn bèn fort e n’en sian fièr.

Vaqui perqué vuei, davans tóuti, vous demandan d’auboura lou poung, coume aurié pas manca de lou faire l’ouncle Laurèns, Laurèns Ayme, vous demandan d’èstre fièr de nòsti tradicioun e d’auboura lou poung en l’ounour de 2000 an de civilisacioun. 



Eirago, lou 15 de janvié de 2015






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Discours d’Eyragues pour la défense et la maintenance de l’encierro à l’eiraguaise

Ce que nous demandons...

Hommes et femmes de bouvine, mainteneurs, venus de tout notre midi, nourris d’un même lait, nous sommes d’une même terre, d’une même nation.

Ce que nous demandons, alors qu’une fois de plus le Midi est menacé, ce n’est pas seulement que l’on fasse preuve de tolérance, qui ne serait que provisoire jusqu’à la prochaine alerte ou que la « protectrice » chantera, c’est surtout qu’on nous reconnaisse le droit de préserver dignement et fièrement notre héritage culturel, par respect pour ceux qui autrefois se sont dressés : Monsieur Mistral, Joseph d’Arbaud, le Marquis et tant d’autres pour sauver notre liberté et nos traditions.

Voilà ce qui est arrivé, aujourd’hui, depuis, au moins trois générations, les trois-quarts de la population ont quitté les campagnes pour les villes, c'est-à-dire qu’il y a quasiment la moitié des gens qui ont rompu avec la façon ancestrale de vivre et qui se sont éloignés de leurs racines. Ils ne se sont pas remis de ce changement brutal de mode de vie, ne sachant plus que faire de leur vie de misère, se passionnant pour des nourritures et des voyages imaginaires pour combler les manques.

C’est alors que depuis une bonne vingtaine d’années ils sont entrés dans une période de retour à la nature et en sont devenus paradoxalement les missionnaires, les responsables les plus ardents. Eux, qui à l’époque, ont quitté la terre des chemins pour le goudron de la ville voudraient aujourd’hui nous donner des leçons.

Nous ne voulons pas revenir sur la sempiternelle opposition entre les gens de la ville et ceux de la campagne, mais il y a une leçon à tirer de tout cela, et la logique paysanne est bien connue, le bon sens ne voudrait-il pas que ce soient ceux qui font vivre nos campagnes, qui sont devant la réalité des choses : les paysans, les bergers, les gardians et tous ceux qui protègent la Provence et la Camargue qui aient la priorité pour donner les avis valables sur la question.

Mais non, l’opinion publique ne se fait pas chez nous, elle se fait là d’où partent les émissions de télévision, les rumeurs, opinion soucieuse d’entretenir sa popularité et de flatter la majorité. Cette majorité composée de ceux qui ne veulent pas savoir qu’en Afrique il y a la famine et la sècheresse mais qui sont émus par le sort des canards dès qu’il fait trop froid, de ces automobilistes qui crient à tue-tête dès qu’il voit un bûcheron qui coupe un arbre, cela pour entretenir et faire retravailler la forêt, mais qui avec les gaz de leurs voitures empoisonnent les bêtes et les plantes, de ces « Robinson Crusoë» du dimanche qui ne font même pas la différence entre le blé et l’avoine.

Et le plus fort c’est qu’ils ne sont qu’un noyau, un noyau et pour s’en convaincre, le clament haut et fort affirmant qu’il n’y a pas mieux que ce qu’ils font. Le noyau ! Mais nous, nous le savons bien que c’est dans le noyau qu’il y a le ver !

Nous n’avons rien contre eux, mais qu’ils ne viennent pas nous dire ce que nous avons à faire, ils gagnent toujours un peu plus de terrain et d’adeptes, c’est vrai ! Ils se sont fabriqués une culture qui leur convient, c’est bien ! Mais ils n’ont pas pour autant le droit de disposer de nous lorsqu’il leur prend l’envie de nous administrer une solution finale « bien pensante ».

Il nous semble que nous pourrions nous mettre d’accord et qu’une relation bien installée entre nous serait nécessaire à l’épanouissement de la société. Réduire le Midi à la seule fin de les faire manger, de leur servir de passe-temps et de bronze-culs pendant les vacances seraient un appauvrissementdramatique. Il doit y avoir autre chose que cet état de fait, c’est tout un système de valeurs que nous défendons, une culture élaborée petit à petit à une époque où neuf personnes sur dix travaillaient la terre. Nous, nous avons reçu l’héritage, d’un savoir faire, d’usages et de traditions, comme la philosophie d’un monde, un art de vivre à envier et à rendre jaloux.

Nous ne sommes qu’une minorité, sur le point d’être renversée, comme un génocide, un génocide culturel est sur le point d’anéantir toutes ces valeurs majeures. La bataille n’est pas gagnée, les mots ne sont pas trop forts, nous les avons vu arriver et s’installer, nous coloniser et nous ronger doucement, arrogants, prétendant nous imposer avec leurs idées, une vision des choses qui n’a rien à voir avec notre culture.

Nous sommes pourtant nous, les héritiers, les enfants du Dieu Mithra, les dépositaires de cette culture, de ces traditions et bien plus, de forces spirituelles et cela vaut bien plus que toute une armée ! Et si tous, tels qu’ils sont, et je les vois ici cachés au milieu de nous, si tous tels qu’ils sont, ils ont leurs usages et leur façon de vivre, nous, nous devons revendiquer les nôtres. Nous sommes une exception, une exception culturelle, grand bien nous fasse, nous le crions bien fort et nous en sommes fiers. 

Voilà pourquoi aujourd’hui, devant tous, nous vous demandons de lever le poing, comme n’aurait pas manqué de le faire l’oncle Laurent, Laurent Ayme, nous vous demandons d’être fiers de nos traditions et de lever le poing en l’honneur de 2000 ans de civilisation.

Eyragues, le 15 janvier 2015


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