A-N-UNA BRUNETA
Es franc voste sourris,- hou sabe,
Palla bruna de l'iol negrous ;
Ses bona e bêla ; e sarié brabe
D'estre aimât d'una couma vous.
Mes la vida qu'es fossa greva
A quau la porta couma ièu,
Es pas quicon que se paulèva
Emb'de : « Ai ! ai !» e de « bon dieu ! «
Es pas la boumiana que vaga
Ma doulou, quistant e bramant ;
Mes es trop paure per la paga
De ça que caup dins vosta man.
Vous, miguarda, que tout on bêla
Voste.biaisset flôri e besiat,
Quittas dins sa nioch plourarela
Moun cadabre descounsoulat :
Pus ges de flamb lou recaliva ;
Pus res de ièu que siegue mièu ;
La qu'aime morta couma-viva
Tout m'a fach eternamen sièu.
Proche l'aiga, que trais pus lenta
Soirn blu cascagnôu mau-courat,
Jout'un tros de terra doulenta,
Moun cor, pecaire ! es be sarrat.
Dourmis sus lou de l'arnigueta
Coum'hou fasièn aici dessus ;
Venès çai pausà l'aurelheta :
L'un ni l'autre poulsou pas pus !
Que me sone la despartida,
Farai qu'acabà de mouri ;
Déjà, sentisse pas ma vida
Ara que per lou souveni.
Chaca vespre, l'oura caruda
Me pica dins l'arma, ai ! ai ! ai !
Que s'amousset dins la sournuda
— Dount'res regrelhet pas jamai! —
La que, tant clarament flourida,
Auriè deugut, soun bèu trelus,
Fins au so.um fa qu'una lusida
De Imita l'oumbra dautolus.
0 soun Les ! Que toun bresilhage
le mande, amistous e fizel,
Di s l'alé suau. de toun fiolhage
Perfum de flous e cant d'aucel ;
E que tout — mar, pineda, serra, —
Dins toun aigueta miralhat,
Rebate en soun som que m'espéra
Un pantai de ça pus aimat !
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A UNE BRUNETTE
Brune à l'oeil noir, votre sourire
Est franc, et certe, il serait doux,
0 bonne et belle, de se dire
Que l'on peut être aimé de vous.
Mais quand on est veuf de son rêve,
La vie est lourde, et ce n'est pas
Une chose que l'on soulève
Avec des : bon Dieu ! des hélas !
Ma douleur n'est pas la pauvresse
Qui va quêtant sur le chemin ;
Mais comment, par quelle richesse.
Payer ce que tient votre main ?
Quand tous convoitent les purs charmes
De votre suprême beauté,
Laissez donc à sa nuit de larmes,
Ce corps que la vie a quitté.
Cadavre froid, quoi qu'il arrive,
Il n'a rien de moi qui soit mien ;
Celle que, morte comme vive
J'aime, à jamais m'a fait tout sien.
Près de l'eau qui tire, plus lente,
Son cher gazouillis azuré,
Dolent, sous la terre dolente.
Mon coeur, hélas! est bien serré.
Il dort sur celui de l'aimée,
Comme nous faisions ci-dessus ;
Dans la tombe à toujours fermée
Ni l'un ni l'autre ne bat plus.
Sonne ce départ que j'envie !
Ce sera finir de mourir.
Pour moi, qui ne sens plus la vie
Déjà que par le souvenir.
Chaque soir dans mon âme tinte,
Tinte lugubre comme un glas
L'heure où dans la nuit s'est éteinte
Et ne se rallumera pas,
Celle qui, de clarté pétrie,
N'aurait dû, rayonnant flambeau,
Faire qu'une lueur fleurie
De toute l'ombre du tombeau.
O son Lez qu'amical, fidèle,
Le doux gazouillis de ton eau
Porte avec ton souffle vers elle
Parfums de fleur et chants d'oiseau ;
Et que tout, mont, bois, mer et grève,
Se mirant dans les flots émus,
En son sommeil reflète un rêve
De ce qu'elle a chéri le plus!
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M. LOUIS-XAVIER DE RICARD
présentation des années 1870
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