mardi 8 janvier 2013

Uchaud : SOUVENI DIS AIGO D’ UCHAUD - Souvéni dis aiga d’Uchaou - 1898

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SOUVENI  DIS  AIGO  D’ UCHAUD
(« Souvéni dis aiga d’Uchaou »)



    C’est un bien beau cadeau de Noël que nous avons reçu de Madame Anny Herrmann, animatrice de la dynamique Escolo dóu Vidourle : la reproduction photographique d’un long poème qui se présente sous la forme d’une affiche réalisée par l’imprimerie « La Laborieuse » de Nîmes, sans doute dans l’année 1898 car le poème est ainsi daté : « Uchaud, le 7 août 1898 »

    Ce texte semble n’avoir jamais été répertorié dans notre histoire littéraire ; il est par ailleurs signé d’un pseudonyme : MONSALOBO-CHA que la lecture du texte va aider à déchiffrer, car le narrateur y est appelé « Chabaou », et un des ses amis s’y dénomme « Salomon ». On peut donc lire ainsi ce pseudonyme : « SALOMON-CHABAUD », sans savoir s’il s’agit de deux co-auteurs ou si c’est bien Chabaud l’auteur unique. Ce qui est sûr c’est qu’il y a de nos jours des Chabaud installés à Uchaud, et qu’une enquête sur place pourrait permettre de retrouver la trace (et peut-être d’autres écrits ?) de notre auteur.


    Car ce texte est important par sa longueur (plusieurs centaines de vers) et aussi par l’originalité du thème : il fait le récit de l’installation à Uchaud d’une pompe à eau, la précision des dates faisant du poème une véritable chronologie des événements.
    Pour toutes ces raisons, il nous a semblé intéressant de redonner ici l’intégralité du texte. Vue sa longueur, nous le donnerons en épisodes qui constitueront un feuilleton, comme c’était la mode à l’époque de l’écriture du poème.


    Nous avons adapté le texte à la graphie mistralienne, l
a seule qui puisse sauvegarder l’authenticité de son expression tout en permettant à ce poème de s’insérer dans la littérature de langue provençale. Cependant, lorsqu’une lettre finale est exigée par les règles mistraliennes alors qu’elle ne figure pas dans le texte, elle sera mise entre parenthèses. Par exemple, le premier vers, qui est dans le texte original :

« En l’an 96, vers lou 15 d’ Aoùs », sera graphié :
« En l’an 96, vers lou 15 d’ Aous(t) 
»


    Pour des raisons de lisibilité et de cohérence de la graphie provençale, nous avons retranscrit (-o) les finales atones qui, à Uchaud, se prononcent [a] : notre (poumpo) et notre (plaço) du vers 3 étaient dans l’original (poumpa) et (plaça), et si le lecteur veut retrouver la prononciation d’Uchaud, il lui faudra lire tous ces –o comme des A. On remarquera aussi que bon nombre de (è) de la langue mistralienne ont été notés fermés (ero, ben, sen, etc) selon les indications du texte original ; seul le prétérit (finales en -è, -èroun, etc.) a été transcrit avec un (è) par souci de lisibilité. A l’inverse, on trouvera quelques (é) fermés de la langue mistralienne qui sont ici ouverts et donc transcrits (è), comme dans (mès) « mis » ou (pès) « poids », cf. par exemple le Chapitre deux.


    Chacun des chapitres de notre feuilleton correspond, dans le document original, à une respiration indiquée par un large espace en blanc avec en son centre trois astérisques en triangle. Les indications en français (chapitres, résumés et notes) sont de notre autorité.


Yves Gourgaud, 
janvier 2013



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Chapitre un

Uchaud souffre de la sécheresse de l’été 1896 - Récriminations des habitants – La municipalité décide de faire creuser un nouveau puits.


En l’an 96, vers lou 15 d’Aous(t),
La grosso secaresso avié’gouta li pous ;
E la poumpa de Magno amai la de la plaço
Poudien pa(s) founciouna, tan(t) que l’aigo ero basso ;
Lou pous de la Coumuno i’avié’n brin qu’ero se,
Tout aquéli quartié cridàvoun bramo-se(t).
I’avié ben per aqui la poumpeto d’en prado,
Mé quan(d) venié lou souer, per fes, ero escoulado.

E n’i’avié que disien : « Es d’aigo que voulen !
Quouro nous mancharés aquelo poumpo à ven(t) ? »
Car despiei lou tem(s) que soupiravian, pechaire !,
I’avié déjà’n bon briu que nous fichavo’n caire :
« Que beguen d’aigo au men(s), s’aven pas trop de vin,
Que n’anen pas toujour quer(r)e encò di vesin ;
S’aquéli bràvi gen(t) nous baràvoun sa porto,
Foudrié, coumo ancien tem(s) fasien en Aigo-Morto,
Car(r)eja d’un mié-miod l’aigo per tout Uchau(d),
La vendre un sòu la dourco ou 5 sòu la semau ! »

E doumai anavian, doumai se fasié sentre ;
Li fenno au lavadou poudien pa(s) pus s’entendre,
Quand nòsti counseié jugèroun à perpau(s)
De faire cava’n pous per abeura Uchaud.



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Chapitre deux

Accompagné d’un ingénieur, le conseil municipal part à la recherche d’un terrain convenable – Bonne volonté de tous les élus – Le maire et l’ingénieur tombent d’accord sur le choix d’un terrain à Coulorgues.

Aiçò vai ben ; après, fouguè cerca lou rode
Lou men(s) endaumajous, amai lou pu(s) coumode ;
Tasteja lou ter(r)en per i cava lou pous,
Trouva sourço aboundento, aigo franco de gous(t).

Un beu jour lou counsel, tóutis en assemblado,
Tout alentour d’Uchaud faguèroun sa tournado
End’un ingénieur qu’ero vengu esprès.
Se vous rapelas ben, fichavo un bon revès :
Lou parapluejo’n man, zou d’un camin à l’autre,
E n’i’avié que disien : « Coumo sen propre, nautre,
De foudre arpanteja noste ter(r)aire ansin !
Bagnaren lis esclo(p) amai lis escarpin ! »
- « Es de noste devé ! », i faguè Ugeneto,
« Pa(s) trop leu que veguen raja’quéli fonneto ;
E ben, se nous bagnan, aniue nous secaren,
Mé per ieu, siei d’avis que marche roundamen. »
-« Bravò ! », fai Marignan, « T’aprouve milo fès !
Amai siegues picho(t), siès un ome de pès !
Se nous sen mès en plaço, es pa(s) per i dourmi,
Fòu faire vitamen ce que lou puple a di. »

E tóuti, en sourisen(t) , mai que mai aprouvèroun,
E pau à pau, tout plan, en Coulorgue arrivèroun.
Alor lou Maire dis : « Se jujas à perpau(s),
Aici metren la poumpo e cavaran lou trau. »
-« Mé vous laissan agi à vosto counissenço,
Car tóuti aven mès en vous la counfienço ;
Savès qu’es un besoun fa’sprès per lou publi,
Foudrié pa(s) que pu(s) tard i’aguèsse quauque oubli. »
L’ingénieur i respond : C’est bien ce que je pense.
Là, vous aurez toujours de l’eau en abondance ;
Nous avons un bon fond de sable et de gravier,
Ici on pourrait donc établir le chantier.




(à suivre)




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