SANT CÈRI
PATROUN DI MOULINIÉ D’ÒLI
(Saint Cyr, patron des mouliniers d’huile)
Pèr Ramoun Haut moulinié à Caroun
Voici ce que nous dit Charles Galtier dans son livre « Les saints guérisseurs, en Provence et Comtat Venaissin » :
« Saint Cyr, en provençal Sant Cèri, Sant Cir ou Sant Ciergue, que l’on fête le 151 juillet à Lançon-de-Provence (Bouches-du-Rhône), guérit, lui, lou mau de Sant Cèri, le mal de Saint Cyr, une sorte de teigne humide qui affecte les enfants. Mistral signale que dans les moulins à huile de la vallée de la Durance, on mettait au dessus du pressoir, une statue ou une image de ce saint qui était le patron des maîtres de pressoir. On connaît toujours dans les pressoirs les vertus de l’huile contre les maladies de la peau et du cuir chevelu ».
Qui était donc ce Saint Cyr vénéré à Lançon-de-Provence ? Il s’agit de Saint Cyr2 de Tarse. La légende rapporte que « Sainte Julitte, originaire d’Iconium, vécut sous l’empereur Dioclétien. Fuyant la persécution, elle prit son petit enfant Cyrique, âgé seulement de trois ans, et vint à Séleucie ; trouvant là les mêmes malheurs, elle passa à Tarse en Cilicie, où elle fut saisie et menée devant le gouverneur. Celui-ci lui arracha son enfant et essaya par des caresses et des flatteries, de l’attirer à lui ; mais l’enfant, criant et balbutiant le nom du Christ, frappait de ses pieds, autant qu’il pouvait, la poitrine du gouverneur ; celui-ci agacé, lui brisa la tête contre les marches du tribunal. Quant à sa bienheureuse mère, après de multiples tortures, elle fut décapitée, vers l’an 296 ».
On ne voit pas, toutefois, dans ce récit, le rapport qu’il pourrait y avoir entre Saint Cyr de Tarse et les moulins d’huile. Or il existe un homonyme qui, lui, pourrait en avoir un : Saint Cyr d’Alexandrie. En effet il est dit que pendant son martyr il fut plongé dans l’huile bouillante. En règle générale, en occident, le patronage des métiers est attribué en fonction d’un épisode saillant de la vie d’un saint et, s’il s’agit d’un martyr, de l’instrument de son supplice. C’est ainsi que Saint Sébastien, percé de flèches, est devenu le patron des archers ; Saint Laurent, torturé sur un gril, celui des rôtisseurs etc…
Le ménologe byzantin, à la date du 31 janvier, fait état de la mémoire des saints thaumaturges et anargyres CYR3 et JEAN : « Saint Cyr était, un pieux Chrétien d’Alexandrie, qui exerçait la profession de médecin et guérissait en même temps beaucoup d’âmes en les conduisant au Christ. Il disait à ceux qui venaient le trouver : « Si vous voulez ne pas tomber malades, gardez-vous du péché ». Loin de se fier à la science médicale et aux remèdes, il guérissait les corps par la prière et ramenait à la vie les âmes égarées dans l’idolâtrie en leur prêchant la parole de Dieu. Constatant les succès qu’il remportait, des païens le dénoncèrent au gouverneur de la ville homme dur et cruel, qui avait été chargé par l’empereur Dioclétien de pourchasser les Chrétiens (vers 303). Sur le point d’être arrêté, Cyr réussit à s’enfuir et parvint jusqu’aux confins de l’Arabie, où il devint moine et acquit une grande renommée par les nombreuses guérisons qu’il accomplissait avec le seul signe de la croix.
La réputation de Cyr parvint alors jusqu’à Jean, soldat d’illustre naissance originaire d’Edesse en Syrie, qui décida alors d’abandonner l’armée terrestre pour entrer dans la milice du Roi céleste. Renonçant à toute richesse et gloire de ce monde, il se rendit à Jérusalem puis retrouva Cyr en Egypte où il devint son disciple et collaborateur, tant dans la pratique des vertus que dans les miracles. Comme la persécution s’étendait, ils apprirent que le gouverneur Cyrianos, avait fait arrêter une Chrétienne de Canope, Athanasie, et ses trois filles : Théoctiste, Théodote et Eudoxie, âgée respectivement de quinze ans, treize ans et onze ans.
Les saints craignant que la faiblesse de la nature féminine et le jeune âge des trois fillettes ne les fassent renier le Christ devant la torture, décidèrent de se rendre à Canope pour les encourager. Ils parvinrent à se glisser dans la prison, mais furent découverts et conduits sans retard vers Syrianos. Celui-ci, pensant que le spectacle de leur tourments allaient faire fléchir les quatre femmes, décida de soumettre Cyr et Jean à la torture devant elles. Mais les deux athlètes restaient inébranlables et communiquèrent aux saintes martyres leur mâle bravoure, si bien qu’elles endurèrent elles aussi la torture sans fléchir. Le gouverneur donna alors l’ordre de les décapiter, et tous marchèrent ensemble d’un pas assuré vers le lieu de l’exécution. Des Chrétiens vinrent recueillir leurs corps et les déposèrent dans l’église de Saint Marc à Alexandrie.
Au Vème siècle, Saint Cyrille d’Alexandrie, voulant faire disparaître le culte idolâtre d’Isis à Menouhli (Aboukir), y fit transférer les reliques de Saints Cyr et Jean.4 Les miracles et les guérisons se mutiplièrent, et ce sanctuaire devint un des plus grands lieux de pèlerinage du monde chrétien. Au VIIème siècle, Saint Sophrone de Jérusalem fut guéri d’une maladie des yeux par une apparition des deux saints : Cyr lui guérit un œil avec le signe de la croix, et peu après Jean lui rendit complètement la vue en lui baisant l’autre œil. En signe de reconnaissance, saint Sophrone écrivit une longue relation de leurs miracles Saints Cyr et Jean sont toujours invoqués efficacement par les Chrétiens orthodoxes parmi les saints anargyres »5.
Quant au Dictionnaire iconographique de L.J. GUENEBAULT (1850), il nous livre ces lignes :
« St Cyr, médecin, né en Syrie, honoré le 31 janvier. Voir le calendrier grec Acta sanctorum des Bollandistes, tome premier du mois de mai.
Figure du 31 janvier.
Ce saint doit être représenté battu de verges, plongé dans l’huile ou la poix bouillante et enfin la tête tranchée.
Debout, tenant une double palme, près de lui les instruments de son double martyre.
Autre figure dans le Menologium Graecorum, figure page 147 du IIème volume, qui le représente décapité ».
Lors des fouilles archéologiques sous-marines entreprises dans la baie d’Aboukir, à partir de 1996, un édifice carré de 30 mètres de côté a été découvert. Il s’agirait du martyrium de Saint Cyr et Saint Jean.
Alan Costantini
1 Le sanctoral latin indique la date du 16 juin pour la fête de Saint Cyr et de Sainte Julitte. En Orient leur synaxe se célèbre le 15 juillet.
2 Il existe différentes orthographes : Quiricus, Cyriacus…
3 La ville d’Aboukir, en Egypte, porte son nom : Abba Kir.
4 La translation de leurs reliques est commémorée le 28 juin.
5 Saints Cyr et Jean sont vénérés parmi les saints anargyres, c'est-à-dire les médecins qui soignaient sans percevoir d’honoraires, et qui guérissaient et continuent de guérir, après leur départ au ciel, les malades qui font appel à eux avec foi. Ces saints guérisseurs sont : Cosme et Damien (17 octobre, 1er novembre, 1er juillet), Cyr et Jean et Triphon (1er février), Thallélaios (20 mai), Hermolaüs (sans mémoire dans le synaxaire, saint local de Chypre), Samson (27 juin), Pantéleimon (27 juillet) et Diomède (16 août).
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