La pèiro plantado
Un conte lozérien d’Emile Philip
Un conte lozérien d’Emile Philip
Emile Philip continue la tradition de prosateur en langue cévenole initiée dans sa famille par son oncle, l’abbé Jean-Baptiste Philip. Ce dernier, né au Bouchet-de-Chadenet (canton du Bleymard) en 1899, va publier deux beaux recueils de proses, le premier en 1956 (Lou merle gabal, 56 pages) et le dernier, bien plus conséquent, en 1974 (Un cop èro à Sent Firmin…, 190 pages). Une prose exemplaire : chaque récit est court (jamais plus de deux pages), ramassé, nerveux, précis.
Son neveu Emile, quant à lui, s’est d’abord signalé en 2009 par un long récit de souvenirs en français : De ma jeunesse…, ouvrage de 331 pages illustré de photos, où le goût pour la lengo nostro apparaît régulièrement (titre d’un chapitre : « La charbounado »). Cet ouvrage apporte d’ailleurs un précieux témoignage sur la personnalité de « l’Oncle », auquel un chapitre entier est consacré (« la visite de l’Oncle », pages 165 à 176).
Mais Emile n’a pas voulu s’en tenir là : à son tour il a pris la plume pour tenir, en langue du pays, une chronique de la civilisation lozérienne. En cours d’élaboration, cette œuvre marquera, je n’en doute pas, une nouvelle étape dans ce qui fait la spécificité de l’écriture cévenole en Lozère, à savoir la construction d’une prose littéraire de haut niveau. Les générations précédentes nous avaient donné les prosateurs Georges Bruniquel (dit Chazenquet) du canton de Florac, Camille Gaillard du canton de Barre-des-Cévennes, et pour le canton du Bleymard, outre Jean-Baptiste Philip, ses deux collègues en religion Ange Peytavin et Félix Vidal. Voilà qu’en quelques mois sont apparus deux nouveaux auteurs en prose, encore et toujours du canton du Bleymard : Hubert Nogaret dont Marsyas2 a déjà parlé, et Emile Philip dont nous donnons maintenant un des deux textes qu’il a eu la gentillesse de confier à l’Armagna Cevenòu 2014.
Son neveu Emile, quant à lui, s’est d’abord signalé en 2009 par un long récit de souvenirs en français : De ma jeunesse…, ouvrage de 331 pages illustré de photos, où le goût pour la lengo nostro apparaît régulièrement (titre d’un chapitre : « La charbounado »). Cet ouvrage apporte d’ailleurs un précieux témoignage sur la personnalité de « l’Oncle », auquel un chapitre entier est consacré (« la visite de l’Oncle », pages 165 à 176).
Mais Emile n’a pas voulu s’en tenir là : à son tour il a pris la plume pour tenir, en langue du pays, une chronique de la civilisation lozérienne. En cours d’élaboration, cette œuvre marquera, je n’en doute pas, une nouvelle étape dans ce qui fait la spécificité de l’écriture cévenole en Lozère, à savoir la construction d’une prose littéraire de haut niveau. Les générations précédentes nous avaient donné les prosateurs Georges Bruniquel (dit Chazenquet) du canton de Florac, Camille Gaillard du canton de Barre-des-Cévennes, et pour le canton du Bleymard, outre Jean-Baptiste Philip, ses deux collègues en religion Ange Peytavin et Félix Vidal. Voilà qu’en quelques mois sont apparus deux nouveaux auteurs en prose, encore et toujours du canton du Bleymard : Hubert Nogaret dont Marsyas2 a déjà parlé, et Emile Philip dont nous donnons maintenant un des deux textes qu’il a eu la gentillesse de confier à l’Armagna Cevenòu 2014.
Yves Gourgaud.
Texte tiré de l’Armagna Cevenòu 2014, aux éditions populaires Aigo Vivo. Pour obtenir cet ouvrage (qui n’est disponible dans aucune librairie) : chèque de 5 euro à l’ordre de : Yves Gourgaud. Adresse postale : Yves Gourgaud, 56 avenue du 8 mai, 30520 Saint-Martin-de-Valgalgues.
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LA PÈIRO PLANTADO
Aquesto pèiro nous dounabo à pensa, e ni parlessiom un jour à nosto cousino Julieto que couneissiò belcop mai de causos que nantres. Nous espliquèt qu’aquesto pèiro s’apelabo un menhir ! e atabé que co-z-èro nostes reires que l’abiòu plantado aqui per adoura quauco dibinitat o belèu, un pau coumo uno crous, per ounoura un grond persounage. E dequé dounc beniò faire aqui quel coulhou d’ome, dinc un païs que memo lous croupatas i si puòdou pas faire ? Tout acò nous passabo subre la testo e pensabiom nantres que lou roucas dubiò beni del Louzero qu’es cafit d’aquelos peirassos. Ni parlessiom pas mai…
L’on d’après, un des prumiòs jours de la primo, nous arribèrou dous persounages que, n’on poudiò pas si troumpa, beniòu pas per esterpa de fems. Un bielhot, la testo ploumado coumo un iòu, un coustume que li fasiò pas dafet lou tour del bentre e uno crabato que penjabo del col jusqu’à sas bralhos. L’antre, uno junesso que dubiò sourti de las grondos escolos, bièn proupret e de buono presentacieu, pourtabo quauques outisses. Prenguèrou lus botos e se meteguèrou à mesura, à bira coumo de fedos malautos altour de la pèiro, à espincha l’afaire coumo un medeci soun pacient, tout en parlent uno lengo que coumpreniom pas bièn.
Julieto, que lous couneissiò, èro aqui, e nantres tabé, amai que ni perdiom pas uno. Quond aguèrou fini de bira e de mesura, s’assetèrou al pè de la bestio. Tout am’un cop, l’arqueoulogo al coustume estrech diguèt, serious coumo un papo -pas aqueste que ris coumo se beniat de l’en counta uno bièn buono- :
« Selon toute vraisemblance et en dépit de sa position peu orthodoxe, ce mégalithe doit être considéré comme un menhir. » Coumprenguère que, dariòs aquelos frasos sabentament entournilhados, ni sabiòu pas mai que nantres. Quauque tems après, benguèrou la redreissa un pau per que co fàsie pus serious. E desempuèi es aqui, quilhado bes lou ciel e fièro coumo Artaban. Quond bendret al Bouchet, manquet pas de la saluda ambé respet, co’s pas uno simplo pèiro tracho aqui per quauque glaciò i o quaucos lunos, mes uno pèiro plantado, un menhir.
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