Pelican l'Einat
Siéu Pelican l'éinat, lou marchand d'escoubeto,
Siéu Pelican l'espeiandra ;
Vènde de barbabou, de mourre, de mourgueto
Culido sus l'erbo di prat ;
Siéu Pelican l'espeiandra.
Se dins ma pocho, un jour, cascaion li dardeno,
Dóu ferre vièi, dóu vèire rout
Penjarai lou grand sa sus ma pauro coudeno ;
E lou savès : menon à tout
Lou ferre vièi, lou vèire rout.
Bessai me menaran, outre ! à leva de chico
Em'uno carriolo à dous chin.
Lou dimenche, i cafè, sus la damo de pico,
Farai tira d'aucèu. Ansin
Roularai carrosso à dous chin.
— Vai bèn. Lou ferre vièi, li barbabou, li peto
T'an enrichi, moun Pelican.
E pièi, di quatre sòu qu'as mes dins la pateto
En trimant pire qu'un pacan,
Que n'en faras, moun Pelican ?
Te lou vau dire : auras acaba ti journado.
Lou nis basti, l'agasso part.
Escranca, tout frounsi, li mesoulo jalado,
A d'autre leissaras ta part ;
Lou nis basti, l'agasso part.
Serignan, febrié 1891
Pélican l'Aîné.
Je suis Pélican l'Aîné, le marchand de petits balais,
Je suis Pélican le dépenaillé;
Je vends du salsifis, du pissenlit,des colimaçons,
Cueillis sur l'herbe des prairies;
Je suis Pélican le dépenaillé.
Si dans ma poche, un jour,sonnent quelques sous,
De la vieille ferraille et du verre cassé,
Je suspendrai le grand sac sur ma pauvre peau,
Et vous le savez : cela mène à tout
La vieille ferraille et le verre cassé.
Peut-être me mèneront-ils, outre! à lever des cocons de rebut
Avec ma carriole à deux chiens.
Le dimanche, dans les cafés, sur la dame de pique,
Je ferai tirer des oiseaux. De la sorte
Je roulerai carrosse à deux chiens.
- Cela va bien. La vieille ferraille, les salsifis, le crottin
T'ont enrichi, mon Pélican.
Et puis des quatre sous que tu as mis dans l'escarcelle
En trimant pire qu'un pacant,
Qu'en feras-tu mon Pélican?
Je vais te dire : tu auras fini tes journées.
Le nid bâti, la pie s'en va
Ereinté, tout ridé, les moelles gelées,
A d'autres tu laisseras ta part;
Le nid bâti, la pie s'en va.
Sérignan, février 1891.
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Jean-Henri Casimir Fabre :
né le 21 décembre 1823 à Saint-Léons du Lévézou (Aveyron), mort le 11 octobre 1915 à Sérignan-du-Comtat (Vaucluse), homme de sciences, humaniste, naturaliste, entomologiste éminent, écrivain passionné par la nature, poète français et provençal, Majoral du Félibrige (Cigalo de Carcassouno, o de l'Amourié) en 1909, et lauréat de l'Académie française.
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